Salut à tous, aujourd’hui, nous allons explorer un nouvel article scientifique intitulé Anchorage loss of the posterior teeth under different extraction patterns in maxillary and mandibular arches using clear aligner: a finite element study (Qiang et al., 2024).
Cet article traite de la perte d’ancrage postérieur lors de l’utilisation des aligneurs transparents dans les traitements orthodontiques avec extraction des prémolaires.
L’importance de cette recherche réside dans sa capacité à apporter une compréhension fine de la biomécanique impliquée dans ces cas complexes, où le mouvement indésirable des molaires compromet les résultats du traitement.
Cet article permet aux orthodontistes de mieux concevoir des stratégies d’ancrage pour minimiser la perte d’ancrage, tout en optimisant la rétraction des dents antérieures.

a Modèle 1 : Ce modèle a simulé le processus de rétraction en bloc après l’extraction des premières prémolaires.
b Modèle 2 : Ce modèle a simulé le processus de rétraction en bloc après l’extraction des secondes prémolaires.
c Les composants spécifiques des deux modèles.
1. De quoi parle cet article ?
Contexte et Objectif
La perte d’ancrage postérieur est un défi majeur lors des traitements par aligneurs avec extraction, particulièrement dans les cas de bi-proalvéolie où l’extraction de prémolaires est souvent indiquée.
Les aligneurs transparents (CAs) ferment les espaces d’extraction en raccourcissant la longueur des aligneurs. La force de contraction générée par l’extrémité des aligneurs provoque un basculement mésial des dents postérieures, surtout lorsqu’il s’agit des secondes prémolaires, ce qui est connu sous le nom d’effet « montagnes russes » (roller coaster effect).
Cet article explore deux schémas d’extraction des prémolaires (1ère prémolaire vs 2e prémolaire) dans les deux arcades (maxillaire et mandibulaire) à l’aide de modélisations par éléments finis.
L’objectif est d’évaluer les différences de perte d’ancrage postérieur entre ces schémas et de fournir des recommandations sur la gestion de l’ancrage en fonction du type d’extraction choisi.
Les chercheurs ont simulé les forces appliquées par les aligneurs sur les dents postérieures pendant la rétraction des dents antérieures, observant les angles de bascule des molaires et prémolaires et les concentrations de stress dans le ligament parodontal.
Méthodologie
L’étude a utilisé deux modèles d’analyse par éléments finis de patients présentant une bi-proalvéolie nécessitant une extraction de prémolaires.
Dans le Modèle 1, les premières prémolaires ont été extraites, tandis que dans le Modèle 2, les secondes prémolaires ont été extraites.
Ces modèles ont simulé la rétraction en bloc des dents antérieures par les aligneurs, tout en mesurant la bascule mésiale des dents postérieures.
Les principaux paramètres étudiés incluent l’angle de bascule des molaires et la distribution du stress hydrostatique dans le ligament parodontal (PDL). Les résultats ont été analysés séparément pour les arcades maxillaires et mandibulaires, afin de déterminer les différences biomécaniques en fonction de la position de l’extraction et de l’arcade concernée.
Résultats
Les résultats montrent que le Modèle 1, avec extraction des premières prémolaires, présentait une meilleure gestion de l’ancrage postérieur, avec une inclinaison mésiale plus faible des molaires par rapport au Modèle 2, où l’extraction des secondes prémolaires induit une plus grande bascule des molaires vers l’avant.
Les dents antérieures dans le Modèle 1 ont montré une inclinaison linguale plus marquée, ce qui contribue à une rétraction plus efficace de l’arcade antérieure. Notamment, les incisives centrales dans les deux modèles présentaient la plus faible tendance à l’inclinaison linguale.
En revanche, dans le Modèle 1, les canines, et dans le Modèle 2, les premières prémolaires, ont montré la tendance la plus marquée à la bascule distale, indiquant une perte d’ancrage significative.
En raison du phénomène de contraction par les aligneurs, les molaires montrent une tendance au basculement mésial plus prononcée dans le Modèle 2, amplifiant l’effet « montagnes russes ».
Les chercheurs suggèrent que l’optimisation de la gestion de l’ancrage postérieur doit être renforcée, notamment par la préparation de l’inclinaison distale des molaires avant le processus de rétraction. Cette approche permettrait de compenser le mouvement des dents antérieures par les aligneurs. Cette méthode fait penser à la préparation d’ancrage décrite par Tweed avec la mise en place d’un tip back molaire pour résister aux forces de mesialisation molaire au cours de la fermeture d’espace d’extraction.
Toutefois, la valeur optimale de cette inclinaison distale dans les différents schémas d’extraction reste encore controversée.
Les résultats ont également révélé que la perte d’ancrage postérieur est plus prononcée dans l’arcade maxillaire, particulièrement en cas d’extraction des secondes prémolaires, ce qui pourrait être attribué à la moindre densité osseuse du maxillaire. Le stress hydrostatique dans le ligament parodontal était également plus homogène dans le Modèle 1, suggérant que l’extraction des premières prémolaires permet une meilleure répartition des forces, limitant ainsi les effets indésirables sur les dents postérieures.

2. Qu’est-ce qu’il faut retenir ?
- Aligneurs et effet « montagnes russes » : La fermeture des espaces d’extraction par les aligneurs induit une force de contraction qui tend à basculer mésialement les molaires, surtout lors de l’extraction des secondes prémolaires.
- Préparation de l’ancrage distale : La préparation d’une inclinaison distale des molaires avant la rétraction des dents antérieures est une solution intéressante pour compenser la bascule mésiale et éviter une perte d’ancrage importante.
- Perte d’ancrage plus importante avec les secondes prémolaires : L’extraction des secondes prémolaires entraîne une bascule mésiale plus marquée des molaires, augmentant le risque de perte d’ancrage.
- Différences selon l’arcade : La perte d’ancrage est plus significative au maxillaire en raison de la densité osseuse plus faible.
- Centralisation du stress dans le ligament parodontal : Une répartition homogène du stress dans le ligament parodontal est observée lorsque les premières prémolaires sont extraites, réduisant ainsi le risque de surcharge qui peut être lié au risque de résorption.
3. Comment le mettre en œuvre ?
Pour intégrer ces découvertes dans la pratique clinique, voici quelques recommandations :
- Préférer l’extraction des premières prémolaires : Lors de la planification des cas de protrusion bimaxillaire, privilégiez l’extraction des premières prémolaires afin de minimiser la perte d’ancrage postérieur et d’optimiser la rétraction des dents antérieures.
- Ajuster la mécanique de rétraction dans le cas d’extraction des secondes prémolaires : Si l’extraction des secondes prémolaires est nécessaire, il est crucial de renforcer l’ancrage postérieur par des dispositifs supplémentaires (mini-vis) ou en utilisant des forces plus faibles pour contrôler la bascule mésiale des molaires.
- Appliquer une préparation d’ancrage préalable : La préparation d’ancrage, qui consiste à prédéfinir une inclinaison distale des molaires avant la rétraction des dents antérieures, est une stratégie intéressante pour éviter l’effet « montagnes russes ». En anticipant ce mouvement des molaires, vous pouvez garantir un meilleur contrôle des forces et limiter la perte d’ancrage postérieur. Cette méthode est particulièrement efficace lorsque l’extraction des secondes prémolaires est inévitable.
- Surveiller la distribution des forces : L’utilisation d’aligneurs exige une surveillance rigoureuse de la distribution des forces appliquées. Les orthodontistes doivent s’assurer que le stress est uniformément réparti dans le ligament parodontal pour éviter les résorptions ou surcharges.
4. Avis personnel
D’après l’article Anchorage loss of the posterior teeth under different extraction patterns in maxillary and mandibular arches using clear aligner (Qiang et al., 2024), ainsi que l’étude de Björn U. Zachrisson (Clinical outcome with mandibular second versus first premolar extractions in orthodontic treatment), il semble que la stratégie d’extraction dépend beaucoup des arcades concernées. Personnellement, je préfère, le plus souvent, réaliser l’extraction des premières prémolaires au maxillaire et celle des secondes prémolaires à la mandibule.
Voici pourquoi :
- Lors de l’extraction des premières prémolaires au maxillaire, il y a une meilleure gestion de l’ancrage postérieur, comme démontré par Qiang et al. (2024). L’effet « montagnes russes » est limité, et les molaires montrent une inclinaison mésiale plus contrôlée.
- En revanche, à la mandibule, l’extraction des secondes prémolaires permet une rétraction plus harmonieuse des segments antérieurs, notamment pour éviter un aplatissement du profil facial. Comme le souligne Zachrisson (2005), cette méthode offre un meilleur contrôle de l’ancrage et une réduction de l’effet de retrusion excessive des incisives mandibulaires, qui pourrait nuire à l’esthétique faciale.
Ainsi, en ajustant la stratégie d’extraction selon l’arcade, il est possible d’optimiser le résultat clinique tout en minimisant les risques de perte d’ancrage postérieur et de modification non souhaitée du profil facial.
En conclusion, la gestion de l’ancrage postérieur est essentielle pour éviter la bascule mésiale des molaires lors de traitements avec extraction. Ces résultats peuvent être appliqués pour améliorer l’efficacité des traitements par aligneurs.
Rejoignez la formation de l’Aligner Study Club pour découvrir comment intégrer ces recommandations et maximiser l’efficacité de vos traitements grâce aux dernières avancées scientifiques.
Dr Daniel BOUHNIK