Salut à tous, aujourd’hui, nous explorons une étude rétrospective intitulée « Deep overbite reduction in adolescent patients treated with Invisalign: A retrospective analysis« (Blundell, Weir, et Meade, 2024).
Cette recherche se concentre sur l’efficacité du traitement Invisalign dans la correction des supracclusions sévères chez les patients adolescents. L’importance de cette étude réside dans son analyse détaillée de l’efficacité réelle du traitement par rapport aux résultats prévus, mettant en lumière les défis spécifiques aux adolescents en cours de croissance et les limites des outils numériques comme le ClinCheck.
1. De quoi parle cet article ?
Méthodologie
Cette étude rétrospective inclut 102 patients adolescents âgés de 10 à 17 ans, issus de la base de données Australasian Aligner Research. Les critères d’inclusion exigeaient une relation molaire de Classe I (ou proche) et une supracclusion ≥2 mm avant traitement. Tous les patients ont été traités uniquement avec Invisalign, utilisant le matériau SmartTrack, et les protocoles G8 et bite ramps étaient optionnels. Les données ont été recueillies sur trois phases :
- T1 : Supracclusion initiale (pré-traitement),
- T2 : Résultat prévu par ClinCheck,
- T3 : Résultat réel obtenu après les aligners prescrits.
Les mesures ont été validées pour leur fiabilité, et l’analyse statistique a inclus des régressions linéaires et des graphiques Bland-Altman pour évaluer les écarts entre les résultats prévus et obtenus.
Résultats principaux
- Efficacité moyenne : Seuls 41,38 % de la réduction prévue de la supracclusion ont été atteints, avec une large variabilité entre les patients.
- Facteurs non significatifs : Ni l’âge, ni l’utilisation des bite ramps, ni l’adoption du protocole G8 n’ont amélioré de manière significative l’efficacité.
- Écart et sévérité initiale : Plus la supracclusion initiale était sévère, plus l’écart entre les résultats prévus et obtenus était important.
- Comparaison avec les adultes : Les adolescents ne montraient pas d’amélioration marquée par rapport aux études similaires chez les adultes.
Discussion et limite
Les résultats soulignent une efficacité limitée des aligners Invisalign pour la correction des supracclusions sévères chez les adolescents, malgré les avancées technologiques. Certaines limitations à cette étude incluent l’absence de radiographies céphalométriques et l’exclusion des séries supplémentaires d’aligners qui auraient pu améliorer les résultats. Cela appelle à des recherches supplémentaires pour améliorer la prédictibilité et exploiter la croissance adolescente dans ces corrections.
2. Qu’est-ce qu’il faut retenir ?
- Efficacité limitée : En moyenne, moins de la moitié des réductions prévues de supracclusion sont atteintes.
- Facteurs sans influence majeure : L’âge, les bite ramps et le protocole G8 n’apportent pas de gains significatifs selon l’étude.
- Importance de la planification réaliste : Les prévisions numériques peuvent être surévaluées pour les supracclusions sévères.
- Recherches nécessaires : Mieux comprendre les variables de croissance et développer des matériaux plus prédictibles est crucial.

3. Comment le mettre en œuvre ?
- Prédictions réalistes : Lors de la planification avec ClinCheck, ajustez les attentes pour les patients présentant des supracclusions initialement sévères. Expliquez la difficulté de la correction et avertir le patient de la nécessité de plusieurs series d’aligneurs.
- Suivi et ajustements : Planifiez un suivi rapproché pour identifier rapidement les écarts avec les prédictions et intervenir si nécessaire avec la commande d’aligneurs supplémentaires.
- Exploration des alternatives : Envisagez des dispositifs auxiliaires (minivis, multi attache…) pour les cas complexes où l’ingression incisive est difficile à réaliser avec les aligneurs seules.
- Formation continue : Les cliniciens doivent rester informés des avancées dans les protocoles et les matériaux aligners.
Conclusion
Cette étude offre des perspectives importantes sur les limites actuelles et les opportunités d’amélioration dans l’utilisation des aligners pour corriger les supracclusions sévères chez les adolescents. Elle rappelle la nécessité d’un équilibre entre attentes technologiques et réalités biologiques dans la planification orthodontique.
Mon avis
Cette étude rétrospective vient renforcer une réalité déjà bien connue en orthodontie par aligners : seuls 50 % des mouvements prévus sont effectivement exprimés, comme démontré également par Haouili & Kravitz (2020).
Cependant, elle apporte un éclairage précieux sur les défis spécifiques aux supracclusions sévères chez les adolescents.
Deux points clés émergent de cette étude :
- La limite de prédictibilité des mouvements dentaires, qui, au-delà d’un certain seuil, nécessite la mise en oeuvre de stratégies particulières.
- Les bite ramps, utilisées seules, ne suffisent pas pour corriger efficacement une supracclusion sévère.
L’absence d’influence de l’âge dans ces résultats reste surprenante. Cela suggère que d’autre facteurs tels que la coopération au port des aligneurs ou la nécessité de stratégie supplémentaire pour tirer parti de la croissance vertical jouent un rôle plus important que prévu?
Pour améliorer la prédictibilité des mouvements, il est important de rappeler que plusieurs approches pratiques méritent d’être systématiquement appliquées :
- Sélection stratégique des attachements pour optimiser les forces biomécaniques.
- Sur-corrections ciblées, en particulier pour les mouvements complexes tels que l’ingression incisive.
- Utilisation d’un stagging adapté, en répartissant les mouvements difficiles sur plusieurs étapes.
- Intégration d’auxiliaires, comme les mini-vis, pour renforcer l’ancrage dans les cas critiques.
- Adaptation du temps de port en fonction de la complexité, bien que l’impact direct reste débattu dans la littérature.
Enfin, cette étude nous rappelle que la technologie ne peut pas encore remplacer entièrement le jugement clinique. Intégrer ces enseignements dans notre pratique quotidienne permettra d’améliorer nos résultats, en exploitant pleinement les avancées technologiques et biomécaniques à venir.
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Dr Daniel BOUHNIK